La Dynastie Saadienne (1554 – 1659) entre restauration de la puissance marocaine et affirmation monétaire

La dynastie Saadienne s’impose au Maroc au milieu du XVIᵉ siècle, après la chute des Wattassides. Originaires du Sous, et se présentant comme des chorfa (descendants du Prophète), les Saadiens obtiennent une forte légitimité religieuse et politique. Leur règne, de 1554 à 1659, marque un tournant : le Maroc retrouve puissance, unité et rayonnement après plus d’un siècle d’instabilité.

Contexte politique et militaire

Les Saadiens réussissent à repousser les invasions portugaises et espagnoles qui avaient affaibli le pays sous les Wattassides. Le fait d’armes le plus célèbre reste la bataille des Trois Rois (Ksar el-Kébir, 1578) où le sultan marocain Abd al-Malik défait l’armée portugaise, entraînant la mort du roi Sébastien du Portugal. Cette victoire réaffirme l’indépendance du Maroc et renforce le prestige de la dynastie.

Sous le règne d’Ahmed al-Mansour (1578–1603), surnommé « al-Dahabi », le Maroc connaît une véritable apogée. Le souverain établit une cour fastueuse à Marrakech, développe les relations diplomatiques avec l’Angleterre et l’Empire ottoman, et lance des expéditions militaires victorieuses au Soudan pour contrôler les routes de l’or.

Caractéristiques générales des monnaies saadiennes

Les monnaies frappées sous les Saadiens présentent plusieurs caractéristiques :

  • Forme : la majorité des dirhams et fractions ont la forme ronde.
  • Métaux : usage intensif de l’argent (dirhams et fractions), retour marqué de l’or (dinars), et plus rarement du cuivre pour de petites transactions locales.
  • Légendes : inscriptions coraniques, titres de souverains (Amir al-Mouminin, al-Imam al-Adil, etc.), avec une calligraphie généralement soignée.
  • Qualité : meilleure facture que les Wattassides, traduisant la prospérité retrouvée.

Principaux souverains et leurs monnaies

  • Mohammed al-Sheikh (1554–1557) : premier sultan Saadien, il initie la frappe de monnaies qui marquent la rupture définitive avec les Wattassides.
  • Abd al-Malik (1576–1578) : connu pour ses dirhams carrés portant des formules religieuses et des titres politiques affirmant sa légitimité.
  • Ahmed al-Mansour al-Dahabi (1578–1603) : figure majeure, il frappe de somptueux dinars d’or qui lui valent son surnom “le Doré”. Ses monnaies sont recherchées pour leur prestige et leur symbolique liée aux richesses sahariennes.
  • Les derniers Saadiens (1603–1659) : leurs monnaies reflètent la période de troubles et de guerres de succession, avec des émissions parfois moins régulières et de moindre qualité.

Types de monnaies saadiennes à collectionner

  • Dirhams en argent : les plus abondants, frappés principalement à Marrakech et Fès, avec plusieurs variantes d’inscriptions.
  • Fractions de dirham (½ et ⅓) : très intéressantes car elles illustrent la diversité de la circulation monétaire quotidienne.
  • Dinars en or : rares et prestigieux, notamment sous Ahmed al-Mansour. Ils constituent le sommet du monnayage Saadien.
  • Pièces en cuivre : peu fréquentes, mais recherchées pour compléter une collection représentative.

Liste indicative des monnaies Saadiennes à collectionner

  1. Dirham de Mohammed al-Sheikh (Fès, Marrakech).
  2. Dirham d’Abd al-Malik (dit de la bataille de Ksar el-Kébir).
  3. Dinar d’or d’Ahmed al-Mansour (Marrakech).
  4. Demi-dirham d’Ahmed al-Mansour.
  5. Tiers de dirham Saadien (période tardive).
  6. Pièces en cuivre locales (souvent de petits modules, rares à trouver).

Conseils pour les collectionneurs

  • Privilégier les provenances fiables : les monnaies saadiennes authentiques sont parfois confondues avec des imitations ou contrefaçons modernes.
  • Observer la qualité des inscriptions : un dirham Saadien bien calligraphié, lisible et complet, a plus de valeur qu’un exemplaire usé.
  • Se méfier des “faux or” : certains dinars attribués aux Saadiens peuvent être des frappes plus tardives ou modernes ; toujours vérifier avec des catalogues de référence (Album, Sylloge, Hazard).
  • Compléter sa collection par séries : commencer par les dirhams courants, puis rechercher progressivement les fractions et les rares dinars en or.
  • Investir dans la documentation : les ouvrages spécialisés (Album, Sylloge Numorum Arabicorum, El Alaoui) sont indispensables pour identifier correctement chaque type.

Conclusion

La dynastie saadienne représente une renaissance du Maroc sur la scène politique et économique, et son monnayage illustre parfaitement cette vitalité. Des dirhams d’argent quotidiens aux fastueux dinars d’or d’Ahmed al-Mansour, les monnaies saadiennes constituent un domaine passionnant et riche pour les collectionneurs et les amateurs d’histoire.

Sources et références :

  • Album, Stephen. Checklist of Islamic Coins. Santa Rosa, 3ᵉ éd., 2011.
  • Sylloge Numorum Arabicorum, Maroc – Fès et Marrakech. Jena, 1986.
  • Julien, Charles-André. Histoire de l’Afrique du Nord. Paris, Payot, 1961.
  • El Alaoui, M. Histoire de la monnaie au Maroc. Rabat, 1996.
  • Abun-Nasr, Jamil. A History of the Maghrib in the Islamic Period. Cambridge University Press, 1987.

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