La Dynastie Almoravide (1056 – 1147) : puissance, raffinement et diversité

La dynastie almoravide apparaît au milieu du XIᵉ siècle. Fondée par Youssef Ibn Tachfine (1056-1106), chef berbère de la tribu saharienne des Lamtouna, elle marque :

l’unification progressive du Maghreb occidental (Maroc, Algérie, Sahara),
l’extension vers l’Andalousie, où les Almoravides viennent soutenir les royaumes musulmans menacés par la Reconquista.

Les Almoravides imposent un État centralisé, structuré par une organisation militaire disciplinée et une religiosité stricte, influencée par le malikisme. Leur domination favorise un essor économique et culturel majeur, notamment dans les domaines du commerce transsaharien, de l’architecture et… de la numismatique.

La monnaie almoravide : prestige et rigueur

Les Almoravides sont restés célèbres pour leurs dinars d’or massifs et leurs frappes d’argent et de cuivre, d’une grande régularité. Leur monnaie avait pour double fonction :

légitimer le pouvoir,
faciliter les échanges dans un espace économique allant du Sahara à la Méditerranée.

Les dinars d’or

Poids standardisé : environ 4,2 g.
Caractéristiques :
- Calligraphie élégante et claire.
- Mentions religieuses (shahada, sourates coraniques).
- Référence au souverain ou au calife abbasside, garantissant l’orthodoxie.
Frappe : Marrakech, Fès, Tlemcen, mais aussi Cordoue, Séville et d’autres cités andalouses.
Exemple notable : dinar de Youssef Ibn Tachfine frappé à Marrakech, symbole de l’autorité d’un empire transméditerranéen.

Les Qirats en argent

Circulation régionale et locale.
Poids variable (~2,7 g en moyenne).
Style sobre, mais inscriptions lisibles, mentionnant souvent le nom du sultan.
Grande diffusion au Maghreb, dans le Sahara et en Andalousie.

Les Qirats (pièces divisionnaires)

L’une des originalités de la numismatique almoravide réside dans ses Qirats en argent, petites divisions destinées aux échanges quotidiens.

Forme : toujours ronde (contrairement aux carrés almohades).
Taille : très petite, souvent inférieure à 10 mm.
Fractions connues :
- ½ Qirat (~1,3 g).
- ¼ Qirat (~0,6 g).
- ⅛ Qirat (~0,3 g).
- ⅟16 de Qirat (~ 0,07 g).

Ces petites monnaies témoignent du soin apporté aux échanges quotidiens et de l’extraordinaire précision technique des ateliers almoravides.
Pour les collectionneurs, les Qirats ronds sont fascinants : bien que minuscules, ils conservent des légendes religieuses et parfois le nom du souverain. Leur rareté en bon état en fait des pièces très recherchées.

Particularités numismatiques

Les Almoravides frappaient des monnaies en or de très haute qualité, largement reconnues sur les marchés méditerranéens, parfois appelées « dinars maraboutiques ».
Leurs monnaies circulaient jusque dans l’Afrique subsaharienne, grâce au commerce transsaharien de l’or et du sel.
Les Qirats miniatures montrent que même les plus petites transactions quotidiennes étaient couvertes par une monnaie fiduciaire.
Les trésors découverts au Maroc et en Espagne contiennent souvent des dinars entiers, preuve de leur usage comme réserve de valeur et comme outil du commerce international.

Importance et héritage

Les monnaies almoravides reflètent :

la richesse économique d’un empire saharien et méditerranéen,
la centralisation politique autour de Marrakech,
une influence religieuse qui se manifeste jusque dans les légendes coraniques soigneusement gravées.

Elles constituent aujourd’hui une référence pour les numismates, à la fois par leur beauté calligraphique et leur rôle historique.

Conseils pour un collectionneur débutant

Commencez par un dirham d’argent : plus grand, il donne une idée complète de la calligraphie almoravide.
Ajoutez les fractions des Qirats ( ½, ¼, ⅛ de Qirat) : abordables, uniques par leur taille miniature et représentatifs de la vie quotidienne.
Si par bonheur vous tombez sur un (⅟16 Qirat), n’hésitez pas une seconde ! Ces pièces minuscules sont d’une rareté exceptionnelle. Comme me l’a dit un ami collectionneur : si tu le trouves, paye ce qu’on te demande, sans discuter !
Visez ensuite un dinar d’or : pièce emblématique, mais au budget plus conséquent.
Vérifiez attentivement :
- le poids (précis au dixième de gramme),
- la lisibilité des légendes malgré la petitesse,
- l’atelier de frappe (Marrakech, Cordoue, Séville, Fès, etc.).
Pour une collection équilibrée : posséder au moins un Qirat, et un dinar donne une vision globale de la numismatique almoravide.

Sources et références :

Lévi-Provençal, É. Histoire de l’Espagne musulmane. Paris, 1936.
Hrbek, I. Berbers and the Islamic State. Oxford, 1990.
Bosworth, C. E. The New Islamic Dynasties: A Chronological and Genealogical Manual. Edinburgh, 1996.
Trousset, P. Numismatique du Maghreb médiéval. Paris, 1987.
Sayegh, M. Monnaies anciennes du Maghreb. Casablanca, 2004.
Numista – Catalogue des monnaies almoravides : Numista Almoravides